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Cameroun : la victoire annoncée de Paul Biya met le pays sous tension

À 92 ans, le président sortant s’apprête à prolonger son règne. Dans les grandes villes, les partisans de son principal opposant, Issa Tchiroma, contestent des résultats jugés « truqués ».

elon la Commission nationale de recensement, Paul Biya aurait remporté la présidentielle du 12 octobre avec 53,66 % des voix. L’opposant Issa Tchiroma Bakary, qui s’est déclaré vainqueur dès le lendemain du scrutin, conteste des résultats qu’il juge « truqués ». Tandis que le Conseil constitutionnel s’apprête à les valider, les manifestations se multiplient à Yaoundé, Douala et Garoua, rapporte la presse camerounaise.

À 24 heures de la proclamation officielle, la tension est montée d’un cran. Durant la journée de mardi, les rues de plusieurs grandes villes se sont embrasées sous la colère des partisans d’Issa Tchiroma Bakary, candidat d’opposition et ancien ministre de la Communication.

Garoua en feu, Yaoundé sous surveillance

À Garoua, son fief du Nord, « les échauffourées ont duré tout l’après-midi », rapporte RFI. Des centaines de jeunes ont envahi les artères principales, affrontant les forces de l’ordre à coups de pierre et de barricade improvisée. Des tirs de sommation ont retenti et une jeune enseignante a été mortellement blessée, selon des sources policières citées par Cameroon Info.

À Yaoundé, le quartier de Tsinga a connu des scènes similaires : jets de gaz lacrymogène, dispersions violentes, arrestations. La manifestation, vite contenue, aura duré moins d’une heure. À Douala, dans le quartier populaire de New-Bell, la tension a monté d’un cran. Des motos-taxis ont été saisies, la circulation a été interdite. Une mesure d’urgence, étendue à d’autres villes du pays.

Les préfets des régions concernées « ont pris des arrêtés pour rétablir l’ordre public », écrit Cameroon Tribune, qui décrit un climat d’« attente fébrile » avant la validation des résultats.

Arrestations, menaces et crispation sécuritaire

À 92 ans, Paul Biya aborde un huitième mandat, soutenu par un appareil d’État resté fidèle et structuré. La disqualification de Maurice Kamto, principal opposant, a ouvert un espace qu’Issa Tchiroma tente d’occuper. « Un pays ne peut exister au service d’un seul homme », a-t-il lancé, selon The Guardian, en s’autoproclamant vainqueur dès le lendemain du scrutin.

Mais la contestation peine à se structurer. « La vérité des urnes sera dite », écrit Le Jour, qui souligne la fragilité d’un mouvement d’opposition « sans ancrage national fort mais porté par une colère réelle ». Les observateurs notent que les divisions internes et le manque de coordination entre les différents partis fragilisent la contestation face à un pouvoir maîtrisant encore tous les leviers institutionnels.

Dans un communiqué, le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a annoncé « plusieurs interpellations » et la transmission d’une vingtaine de dossiers à la justice militaire pour « insurrection et incitation à la révolte ».

À Douala, une antenne de l’office électoral a été attaquée, rapporte StopBlaBlaCam. Le gouvernement justifie ces mesures par la nécessité d’éviter « toute déstabilisation ». Les ONG locales, elles, dénoncent un « usage disproportionné de la force » et un verrouillage de l’espace public.

Depuis le début de la semaine, la police et la gendarmerie multiplient les patrouilles, les points de contrôle et les arrestations préventives. Des coupures de connexion Internet ont été signalées dans plusieurs quartiers de la capitale.

Une jeunesse en quête de changement

Sur les réseaux sociaux, les vidéos de barricades, de motos incendiées et de rassemblements nocturnes se multiplient. « Nous voulons le changement, pas la peur », confie à Africanews un jeune manifestant de Garoua, le visage couvert par un foulard.

La jeunesse camerounaise, qui représente plus de 60 % de la population, se retrouve en première ligne. Entre chômage élevé, corruption endémique et absence de perspectives, beaucoup voient dans cette élection « la dernière chance d’un basculement pacifique ».

Pour The East African, « la lassitude générationnelle s’exprime désormais dans la rue, pas dans les urnes ». Les mobilisations spontanées rappellent celles de 2008 ou de 2018, quand la hausse des prix et les soupçons de fraudes avaient déjà provoqué des émeutes meurtrières.

Entre contentieux et résignation

« C’est terminé », titrait Cameroon Tribune le 21 octobre. Le lendemain, le quotidien nuançait : « Place désormais au contentieux. » En attendant la proclamation définitive du 23 octobre, le Cameroun retient son souffle.

Pour Mutations, journal indépendant de Yaoundé, « la rue gronde, mais le système reste imperturbable, fort de ses réseaux, de ses préfets et de son armée ». Le pouvoir, sûr de lui, poursuit sa route, fort d’une légitimité institutionnelle que conteste la moitié du pays.

La rue, elle, continue de battre au rythme des slogans : « Biya doit partir », « On veut voter pour de vrai ». Mais, au-delà de la colère, c’est une résignation qui s’installe. « Beaucoup savent que rien ne changera tant que le système tiendra », analyse un enseignant de Douala cité par Mediacongo.

À l’approche de la validation finale des résultats, le Cameroun semble rejouer un scénario bien connu : celui d’une victoire sans surprise, d’une opposition muselée et d’une jeunesse qui, faute de croire au vote, reprend la rue.

Source: www.lepoint.fr

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