L’Inde accueille samedi et dimanche les dirigeants des 19 principales économies mondiales et de l’Union européenne, en l’absence des dirigeants russe et chinois, Vladimir Poutine et Xi Jinping.
Changement climatique, guerre en Ukraine, système financier mondial… Les sujets au menu du sommet du G20 qui se tient à New Delhi (Inde), samedi 9 et dimanche 10 septembre, promettent des discussions houleuses. Les crises auxquelles sont confrontées les parties prenantes à ce forum, composé de 19 pays et de l’Union européenne, qui représentent environ 85% du PIB mondial, sont « bien plus difficiles, plus compliquées et plus inquiétantes qu’elles ne l’ont été depuis longtemps », a même reconnu le ministre des Affaires étrangères indien, Subrahmanyam Jaishankar.
Au point qu’il n’est pas certain que le sommet débouche sur une déclaration commune, comme ce fut le cas l’an dernier à Bali (Indonésie), pour condamner la guerre en Ukraine. Sur quoi portent les divergences entre les participants ? Que vont chercher à obtenir les forces en présence ? Franceinfo fait le point sur les enjeux de ce sommet.
1Une occasion pour l’Inde de briller sur la scène internationale
L’Inde a dépassé l’an dernier le Royaume-Uni pour devenir la cinquième économie mondiale et elle vient par ailleurs d’affirmer son statut de puissance spatiale en posant un engin sur la Lune. Ce sommet du G20 lui donne une nouvelle occasion d’affirmer sa place dans la hiérarchie internationale, cette fois sur la scène diplomatique.
Le Premier ministre indien, Narendra Modi, présente son pays comme le leader du « Sud global », qui se veut un pont entre les pays développés et les pays en développement. Il fait ainsi pression pour que le bloc s’élargisse pour devenir un G21, en accueillant l’Union africaine en tant que membre permanent. Narendra Modi tente également de convaincre ses homologues étrangers de réformer les institutions multilatérales telles que l’ONU, en y donnant davantage de poids aux pays en développement.
« Si l’Inde arrive à imposer ces sujets sur l’arène internationale, alors ce G20 sera considéré comme un succès par New Delhi », explique aux Echos Harsh V. Pant, professeur en relations internationales. Une victoire diplomatique sera particulièrement intéressante politiquement pour Narendra Modi, à l’approche des élections générales en Inde, au printemps 2024.
Mais pousser les grandes puissances au consensus relève du défi, alors que bon nombre de pays du G20 sont à couteaux tirés – les Etats-Unis et l’Inde sont par exemple en froid avec la Chine. Surtout, les participants sont très divisés sur la question de la guerre en Ukraine. De nombreux pays en développement sont plus préoccupés par le prix des céréales, après le retrait de Moscou d’un accord avec Kiev sur leur acheminement, que par les condamnations diplomatiques réclamées par les dirigeants européens.
De son côté, la Chine a toujours refusé de condamner l’attitude russe, tout comme l’Inde, coincée entre sa dépendance vis-à-vis des armes et de l’énergie russes d’une part, et sa volonté de coopération avec les Occidentaux de l’autre. Cette neutralité pourrait néanmoins lui permettre de jouer un rôle de médiateur dans l’hypothèse d’une sortie de crise.
2Les Etats-Unis veulent peser face à la Chine et l’extension des Brics
Le président américain, Joe Biden, a rencontré vendredi dès son arrivée à New Delhi le Premier ministre indien, qu’il avait reçu en grande pompe en juin à la Maison Blanche. Les Etats-Unis voient l’Inde comme un allié naturel, capable de faire face au rôle de plus en plus affirmé de la Chine. L’administration Biden a salué de façon répétée le leadership de Narendra Modi et affirmé qu’elle entendait travailler de concert avec lui pour faire en sorte que le G20 reste le principal forum de coopération économique mondiale.
Le G20 est aujourd’hui le seul espace où se rencontrent à la fois pays du Sud et pays développés, mais il est de plus en plus concurrencé par des blocs régionaux, notamment les Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Cette coopération des principaux pays émergents, qui a récemment annoncé l’arrivée dès janvier de six nouveaux membres, dont l’Iran et l’Arabie saoudite, cherche à contrebalancer l’influence occidentale (Etats-Unis et Europe), ce qui inquiète Washington.
L’absence au sommet indien du président russe, Vladimir Poutine, et de son homologue chinois, Xi Jinping, n’aide pas à appuyer l’argument américain selon lequel le G20 est le lieu où tout se décide. Mais les Etats-Unis entendent néanmoins profiter de ce grand raout diplomatique pour vanter leur bonne santé économique, afin de convaincre les pays en voie de développement de se tourner vers eux plutôt que vers la Chine, qui connaît de son côté un important ralentissement, comme le rappelle France Culture.
3Les pays du Sud réclament toujours de l’aide pour devenir plus « verts »
En amont du sommet, le Premier ministre indien a appelé les dirigeants du G20 à aider les pays en développement pour lutter contre le changement climatique. « Les ambitions en matière d’action climatique doivent s’accompagner d’actions en matière de financement du climat et de transfert de technologies », a réclamé Narendra Modi dans une tribune publiée par plusieurs médias indiens et des quotidiens internationaux.
Par ailleurs, plusieurs dirigeants africains, mais aussi l’ONU, ont appelé à une réforme du système financier international pour l’adapter aux exigences de la lutte contre le réchauffement climatique. Ils ont notamment remis sur la table l’idée d’un allègement de la dette des pays du Sud, détaille TV5 Monde Afrique.
De leur côté, les pays riches, principaux pollueurs de la planète, n’ont pas encore tenu leur promesse de fournir aux pays pauvres 100 milliards de dollars par an de financement pour le climat. Ce qui fait douter les militants écologistes sur la réelle volonté des pays développés à relever les défis environnementaux.
Lors d’une réunion des ministres de l’Energie du G20 en juillet, les participants n’ont ainsi pas réussi à s’accorder sur une feuille de route visant à réduire progressivement l’utilisation des combustibles fossiles, ni même à mentionner le charbon, combustible sale qui reste une source d’énergie essentielle pour des économies telles que l’Inde et la Chine. Ces dernières, qui comptent parmi les plus grands pollueurs de la planète, affirment que les pollueurs historiques de l’Occident doivent assumer une responsabilité beaucoup plus importante dans la crise climatique mondiale actuelle.
Source: www.francetvinfo.fr